Montréal, le 13 septembre 2021 – Au cours des dernières semaines, les gouvernements provinciaux au Québec et dans le reste du Canada ont étendu l’accès à Hemlibra aux patients atteints d’hémophilie A sans inhibiteurs. Cependant, contrairement aux concentrés de facteur VIII, Hemlibra ne sera pas offert à toutes les personnes atteintes d’hémophilie A.
Hemlibra a été initialement approuvé à l’été 2019 pour tous les patients ayant des inhibiteurs du facteur VIII.
Qui alors est admissible dans les régions desservies par la Société canadienne du sang?
Dans les provinces et territoires desservis par la SCS (tous à l’exception du Québec), les services de santé ont étendu l’accès, sans restriction relative à l’âge, afin d’inclure les personnes atteintes d’hémophilie A congénitale grave (niveau intrinsèque de facteur VIII < 1 %) sans inhibiteurs qui sont des candidats à la prophylaxie de routine pour prévenir les saignements ou réduire la fréquence des épisodes de saignement. Cela signifie que les personnes atteintes d’hémophilie modérée, même celles ayant des niveaux de facteur VIII légèrement supérieurs à 1 %, ne sont pas admissibles. Toutes les études de recherche qui ont mené à l’homologation d’Hemlibra ont été réalisées auprès de personnes atteintes d’hémophilie A grave. Un niveau de facteur VIII de 1 % ou moins est la définition standard de l’hémophilie grave. La recherche sur l’efficacité d’Hemlibra chez les personnes dont les taux de facteur VIII sont supérieurs à 1 % ne fait que commencer.
On reconnaît de plus en plus que le niveau de facteur, tel que mesuré dans un test de laboratoire, n’est pas le seul élément ayant une incidence sur la gravité des symptômes cliniques. Il y a d’autres éléments qui ont une incidence sur la fréquence des saignements et la facilité avec laquelle ils peuvent se produire; certains de ces éléments peuvent être expliqués par les chercheurs, d’autres non. Certaines personnes ayant des niveaux de facteur inférieurs à 1 % saignent rarement sans cause apparente, tandis que d’autres personnes se situant dans la fourchette modérée de 1 à 5 % peuvent subir fréquemment des saignements non traumatiques. Alors que la recherche se poursuit et que l’on tient de plus en plus compte des saignements cliniques plutôt que des essais de taux de facteur mesurés par des tests de laboratoire, nous pouvons seulement espérer que cette tendance gagne du terrain et que les patients atteints d’hémophilie modérée qui ont besoin de la prophylaxie deviennent admissibles à recevoir Hemlibra.
La SCS a annoncé qu’Hemlibra devrait être disponible dans les centres de traitement de l’hémophilie à la mi-octobre.
Qui est admissible au Québec?
Au Québec, les autorités sanitaires ont adopté une approche plus clinique qui n’est pas fondée uniquement sur les résultats de laboratoire. L’accès à Hemlibra a été étendu à l’utilisation prophylactique chez les patients atteints d’hémophilie modérée ou grave, comme le recommandaient la Société canadienne de l’hémophilie et l’Association canadienne des directeurs de clinique d’hémophilie. Reconnaissant la difficulté de l’accès veineux, les autorités sanitaires n’imposent aucune condition à l’admissibilité à Hemlibra pour les enfants de quatre ans et moins. Toutefois, pour les personnes de cinq ans et plus, Hemlibra serait uniquement offert si le coût annuel ne dépasse pas le coût annuel du facteur VIII.
Qu’est-ce que cela signifie? Premièrement, le fabricant d’Hemlibra, Roche, et Héma-Québec, qui achète les produits de coagulation et les distribue aux hôpitaux du Québec, doivent négocier un prix. On ne peut que souhaiter qu’ils s’entendent rapidement sur un prix concurrentiel qui permettra l’accès à Hemlibra à tous les patients atteints d’hémophilie modérée et grave qui ont besoin de prophylaxie, si tel est le choix du patient et de son médecin.
Mais comment les coûts annuels seront-ils comparés? Fera-t-on le calcul pour chaque patient? Cela serait extrêmement difficile. L’utilisation de facteur pour une personne varie énormément d’une année à l’autre; le dosage d’Hemlibra, et donc son coût, est fixe. Ferait-on le calcul en comparant les coûts de l’hémophilie A pour tous les patients? Avec quoi ferait-on la comparaison? Le coût moyen du FVIII l’an dernier? Au cours des cinq dernières années? À quoi peut-on comparer Hemlibra : le coût si le taux résiduel cible de facteur VIII est de 1 % (la cible traditionnelle), ou 5 % (pour modifier la condition d’une personne de grave à légère) ou même 15 % (l’équivalent de facteur VIII d’Hemlibra)? Ce sont les réponses à ces questions qui détermineront qui est admissible.
La date de disponibilité d’Hemlibra au Québec dépendra de la vitesse des négociations contractuelles entre Roche et Héma-Québec.
Comment fonctionne Hemlibra?
Hemlibra est un anticorps monoclonal qui remplit la même fonction que le facteur VIII, la protéine naturelle manquante dans le sang des personnes atteintes d’hémophilie A, qui sous différentes formes, a été le traitement de routine au cours des 70 dernières années. Le facteur VIII est administré à la fois pour enrayer et pour prévenir les saignements; Hemlibra, par contre, ne peut être utilisé que pour prévenir les saignements (prophylaxie). En cas de saignement actif nécessitant un traitement, il faudrait injecter du facteur VIII.
Hemlibra est …
- … plus efficace que le facteur VIII pour prévenir les saignements chez la plupart des patients atteints d’hémophilie A grave. Il procure un niveau constant de coagulation équivalant à un niveau de facteur VIII d’environ 15 %.
- … plus facile à administrer. Il est administré par injection sous-cutanée (sous la peau) plutôt que par injection intraveineuse (dans une veine), comme le facteur VIII.
- … administré moins souvent, seulement une fois par semaine ou moins comparativement à deux à sept fois par semaine pour le facteur VIII.
Bien que l’élargissement de l’accès à Hemlibra représente une excellente nouvelle, certaines interrogations demeurent. Comme c’est souvent le cas, le diable est dans les détails. Il reste encore du travail à faire pour assurer l’accès à Hemlibra pour tous ceux qui pourraient en bénéficier. À suivre.