À l’occasion du Sommet virtuel de la Fédération mondiale de l’hémophilie, plusieurs conférenciers de renom ont jugé bon de redéfinir la prophylaxie en cette période d’innovations thérapeutiques, y compris sans concentrés de facteur.
Le Dr Victor Blanchette, principal chercheur associé du programme Child Health Evaluative Sciences, à l’Hôpital pour enfants malades de Toronto, a amorcé la séance avec des définitions.
Il a cité des recherches (Collins, JTH, 2009, 2010) selon lesquelles l’observance thérapeutique à l’endroit de la prophylaxie, ou le défaut d’y adhérer adéquatement, était le principal facteur du maintien, ou non, de la santé articulaire. D’autres travaux (Oldenbourg, Blood, 2015) ont fait état d’arthropathies progressant sur une période de 30 ans malgré une prophylaxie par concentrés de facteur, sans même que des saignements cliniques soient signalés.
Le second conférencier, le Dr Robert Klamroth, directeur du centre de traitement de l’hémophilie de l’hôpital Vivantes, à Friedrichshain, en Allemagne, a pour sa part cité l’étude déterminante de Den Uijl (Haemophilia, 2011) selon laquelle on observait très peu d’atteintes articulaires chez les personnes ayant maintenu un taux de FVIII de 11 % ou plus, ce qui est clairement irréalisable avec les concentrés de FVIII actuellement utilisés pour traiter l’hémophilie A grave. Sa propre recherche (ISTH, 2019) comparait deux cohortes, une présentant un taux minimal (creux plasmatique) de 1 % à 3 % et l’autre de 8 % à 12 %. Sans surprise, le taux annuel de saignements était moindre et la proportion de patients n’ayant présenté aucun saignement était plus grande dans le second groupe, qui a par ailleurs reçu plus de perfusions et une quantité deux fois plus élevée d’unités de FVIII.
Le troisième conférencier, le Dr Johnny Mahlangu, professeur d’hématologie à l’Université de Witwatersrand, à Johannesburg, en Afrique du Sud, a conclu que l’objectif du traitement optimal de l’hémophilie devrait être une prophylaxie à l’état d’équilibre – c.-à-d., une absence des pics et de creux plasmatiques marqués qu’il est possible d’obtenir avec des produits substitutifs approuvés, tels que l’émicizumab qui imite le facteur VIII, et avec des produits expérimentaux visant à rééquilibrer l’hémostase et la thrombose, comme l’ARN interférent (p. ex., fitusiran), les inhibiteurs de la voie du facteur tissulaire et les anti-protéine C.